vendredi 16 janvier 2015

16 janvier 2015 : rencontre conjointe du Réseau des Ecoles Publiques Alternatives du Québec. (REPAQ)


Pour cette nouvelle rencontre au cours de laquelle j'interviens dans l'atelier que j'aurais envie d'appeler "Vers l'école inclusive", j'ai proposé que nous procédions par analyse de cas afin d'appuyer nos échanges et réflexions sur du concret.

Ci dessous :
  1. le courrier qui a été envoyé aux participants
  2. le compte rendu que j'en ai fait
    Chers participants à l'atelier "enfants à défis particuliers",
    Nous aimerions vous proposer d'aller plus avant dans notre réflexion sur la scolarisation inclusive profitable à tous les enfants, y compris donc aux élèves "à défis particuliers" (appellation REPAQ) c'est à dire aussi élèves HDAA (appellation MELS). Plus avant, c'est à dire, partant des réalités de terrain, car comme le disait l'historien Antoine Prost, "la pédagogie, c'est comme l'aviation, le danger, c'est le contact avec le terrain."
    Nos deux premières rencontres ont permis de faire un tour d'horizon de la façon dont chacun ressent cette question, de la situer dans la brève histoire de l'émergence du postulat d'éducabilité des "enfants à défis particuliers" et enfin d'apprendre à situer et différencier les modalités de leur scolarisation dans l'un ou l'autre des cadres de référence possibles : exclusion, ségrégation, intégration, inclusion. (Voir pour tout cela les comptes rendus)

    Il serait intéressant de partir maintenant des situations concrètes.
    Nous aimerions inviter un participant ou une participante (enseignant(e) ou parent ou direction) à présenter la situation d'un élève handicapé scolarisé dans son école. Sous réserve de la confidentialité nécessaire, cette personne pourrait décrire oralement au groupe la situation en indiquant :

    Quel est l'âge de l'enfant ?
    Quel est son niveau académique ?
    Son histoire scolaire
    Décrire la classe et son fonctionnement général; la situer dans l'école

    Que se passe-t-il pour cet enfant dans ses relations à l'école avec
    - les adultes (enseignant et chacun des autres intervenants)
    - les enfants (de sa classe, des autres classes)
    Comment se comporte-t-il dans les moments consacrés aux apprentissages ?
    Comment se comporte-t-il dans les moments consacrés à la détente ?
    (Décrire une (ou quelques) activité à laquelle le témoin et l'élève ont participé)
    Qu'est-ce qui "marche bien" ?
    Quels sont les succès obtenus ?
    Quelles sont les difficultés rencontrées par l'élève ?
    Quelles sont les difficultés rencontrées par ceux qui ont affaire à lui ? (enfants et adultes)
    Quelle(s) question(s) cette situation vous pose-t-elle ? 
    Quelle(s) question(s) cette situation pose-t-elle aux autres personnes dans l'école ? 
    Ensuite, tous les participants au groupe pourraient à partir de ce qui vient d'être rapporté intervenir pour
    - demander des précisions afin de mieux comprendre la situation
    - indiquer ce qu'on aimerait retenir de ce témoignage
    - avancer quelques propositions
    - faire des rapprochements avec ce qu'on vit dans sa propre école
    - retenir ce qui semble ouvrir une voie vers des pratiques inclusives ?
    En pratique : qui osera faire le premier pas et proposer d'exposer une situation ? 
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    CE QUI FAVORISE L’INCLUSION DANS LE CAS D’OLIVIER
    (1ER CAS PRÉSENTÉ)

    Conditions générales : admission, entrée dans la classe, déroulement de la scolarité
    ·      Un diagnostic précoce et annoncé aux acteurs (Trouble du Spectre de l’Autisme)
    ·      Une scolarisation dès la maternelle alternative dans la même école
    ·      Une préparation à l’entrée en primaire par des petits moments en classe dès le mois de juin précédent
    ·      Un enfant fort au plan académique
    ·      Deux années de scolarisation dans la même classe qui mettent plus en évidence ses progrès

    Avec la famille, les autres parents
    ·      Un fort soutien familial à l’enfant et à l’enseignante (et réciproquement sans doute)
    ·      Une forte collaboration enseignante-famille
    ·      Obtenir l’assentiment et la compréhension des autres parents

    L’enseignante
    ·      Une enseignante qui se dit elle-même « solide » et on le sent (!)
    ·      Une enseignante qui se dit elle-même « maternante » et « encadrante »

    Les autres élèves
    ·      Donner un rôle positif, d’aide, aux autres enfants : une grande tolérance de leur part, travaillée par l’enseignante en donnant de l’information, en aidant à comprendre comment ils peuvent aider
    ·      Faire expérimenter toutes ces activités à tous les élèves
    ·      Prendre le temps d’un entretien avec tous les élèves suite à une crise importante

    Adaptations pédagogiques
    ·      Une petite aide de TES pour le moment crucial de l’entrée en classe et ponctuellement
    ·      Une adaptation des exigences sur la mise au travail : au début, 10 minutes de travail / 10 minutes de pause
    ·      L’invention d’outils pour l’aider à prendre conscience et à tempérer ce qui est le plus gênant pour la classe dans son trouble : la stridence de sa voix
    ·      Lui faciliter l’accès à des activités apaisantes 
    ·      Accepter de tenir compte de ses aversions : trop de monde, trop de bruit, trop de lumière parfois pour lui
    ·      Prendre le temps (et c’est gourmand en temps) de lui montrer comment utiliser les outils d’aide à la communication
    ·      Accepter de chercher à comprendre les intérêts de l’enfant : en l’occurrence, l’univers du jeu vidéo MineCraft


    CE QUI FAVORISE L’INCLUSION DANS LE CAS DE CHRISTIAN
    (2ÈME  CAS PRÉSENTÉ)

    diagnostic : TDAH avec trouble anxieux

    ·      Prendre appui sur ses intérêts (activités physiques, jeux vidéos) pour obtenir sa mise au travail : gagner petit à petit un temps plus long et plus régulier de travail
    ·      Considérer son intérêt pour les sciences, (la manipulation)
    ·      Des exigences de travail introduites progressivement
    ·      Commencer par accepter sa préférence pour le travail 1 / 1
    ·      Des parents de l’élève collaborateurs
    ·      Deux années dans la même classe pour mieux connaître l’élève
    ·      Intervention d’une psychoéducatrice (1/2 journée /semaine) + une remplaçante (1 heure /2 semaines)
    ·      Un travail auprès des autres élèves pour obtenir qu’ils soient plus tolérants
    ·      Acquisition progressive d’amis parmi les autres élèves

    Les obstacles rencontrés :
    ·      Rejet par les autres élèves et par les parents de ceux-ci (la première année)
    ·      L’arrivée en cours de scolarité à l’école alternative (1er et 2ème cycles en école régulière avec beaucoup de difficultés)
    ·      Un élève fortement démotivé
    ·      Des relations mère-fils difficiles
    ·      Des inquiétudes pour la suite : l’an prochain au secondaire…


    EN CONCLUSION, TRÈS PROVISOIRE…

    La formule de travail par étude de cas est très riche et prometteuse. Merci infiniment aux deux enseignantes qui ont accepté de l’inaugurer.
    Elles ont témoigné de beaucoup d’inventivité, de capacité d’adaptation, d’opiniâtreté… un travail dont l’une a dit qu’il allait « au-delà » du travail habituel d’enseignante. Cela se comprend parfaitement dans la situation actuelle mais cela montre bien aussi que tant qu’on ne considèrera pas que le travail « normal » d’enseignant, c’est de tout mettre en œuvre pour avoir une pratique inclusive, on restera dans la lutte permanente pour obtenir une scolarisation due à ces élèves « à défis particuliers ». Or, c’est ce « normal-là » qui doit avoir les moyens d’agir (soutien, formation… ) pour ne pas rester le seul fait d’une poignée de héros.
    A la vérité, on peut considérer que c’est l’enseignant régulier-ordinaire qui, par manque de formation le plus souvent, parfois de motivation, s’est malheureusement spécialisé … dans les élèves standards !
    Tout n’est pas rose dans ce qu’elles nous ont dit. Pour elles, d’abord, : fatigue, lassitude, inquiétude pour l’avenir de l’élève lorsqu’il aura quitté leur classe. Pour ce dernier, on ne peut que souhaiter qu’il rencontre dans ses autres classes, la même qualité d’engagement de la part de ses enseignants en harmonie avec celui que lui accorde indéfectiblement ses parents.
    Un aspect des situations n’a pas été beaucoup évoqué à travers ces deux témoignages et les échanges qui s’en sont suivis : celui de l’école au sein de laquelle se situe la classe. Il faudrait explorer aussi comment les autres acteurs et l’environnement plus général de l’école peut contribuer à une scolarisation inclusive. Ce sera pour la prochaine fois peut-être, sur la base par exemple d’un témoignage d’une direction d’école (voilà, l’appel est lancé !)

    En poursuivant cet atelier, nous pourrions sans doute identifier ce qui dans les pratiques propres aux EA constitue des atouts décisifs pour réussir une scolarisation inclusive. Quels liens avec les 17 chacune des 17 conditions ? (il me semble qu’ils sont très nombreux)

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